L’art de manipuler une feuille de papier

L’art de manipuler une feuille de papier

Emma

Fillette de 4 ans, Emma souffre d’une agénésie de la main droite.
Sa maman s’est tournée vers E-Nable pour répondre à deux problématiques qu’Emma vit au quotidien à l’école :

  1. Déboucher et reboucher des feutres: sans prise efficace du bouchon, il est difficile de manipuler les feutres.
  2. Maintenir une feuille de papier pour réaliser du découpage.

Un nouveau défi pour l’équipe Gre-Nable, qui n’a pas encore de solution sur étagère à proposer.

Emma a également émit un dernier souhait, hautement important : la main devra être rose et bleue. Contrainte difficile à tenir, mais nous ferons tout notre possible pour y parvenir !

Pourquoi la main classique ne répond pas au besoin

La traditionnelle main de E-Nable ne correspond pas au besoin d’Emma. Elle a besoin d’un serrage très fort pour pincer une feuille, et réglable pour s’adapter à tout diamètre de feutre.
Une solution sur-mesure est donc nécessaire.

La première étape consistera donc, classiquement, au moulage du bras.

Moulage et scan du bras

La soirée moulage aura permis à Emma et sa maman de rencontrer les membres de l’équipe. Nous avons aussi profité de cette rencontre pour mieux appréhender la solution, en fonction des mouvements que peut réaliser la petite.

Deux techniques sont utilisées ici.

1- Le scan 3D appliqué directement sur le bras d’Emma

La difficulté de cette méthode réside dans le fait que le sujet doit rester parfaitement immobile, au risque de fausser les volumes scannés. Avec des petites retouches Blender, le scan est parfaitement utilisable !

Emma s’est prise au jeu avec brio et n’a pas bougé d’un poil. Les résultats sont impeccables ! 

2- Le traditionnel moulage au plâtre

Que l’on a scanné par la suite sous toutes coutures.

En plus, l’activité est plutôt amusante 🙂

Une fois le moule réalisé, nous avons pu le scanner lui aussi.

Une fois les scans réalisés, la balle est dans notre camp ! A nous de jouer !

 

Les prototypes

Premier prototype : système à bille

Le premier prototype réalisé propose une solution à base d’une bille.
L’idée étant de permettre à une enfant d’exercer une grosse pression avec un très petit mouvement de base.

En pratique, le système n’est pas franchement concluant: la bille en métal use trop rapidement le PLA de l’impression.
Les tolérances sont également trop larges avec ce matériau, et le mouvement n’est tout simplement pas fluide.

Solution validée : système à pince excentrique

La deuxième solution revient à une mécanique plus simple.
L’idée est inspirée d’un classique serrage de selle de vélo: un petit mouvement de levier qui produit un couple de serrage énorme.

En quelques prototypes, le concept est validé.
Les itérations suivantes servent principalement à optimiser la force de serrage.

Le couple de serrage est excellent et facile.
Un ressort permet de conserver la pince en position ouverte.

L’axe étant fileté, il suffit de visser/dévisser la poignée pour choisir son ouverture maximale.

Manchon du bras

Une nouveauté de Gre-nable : l’emboiture amovible pour la fixation au bras.

Séparer la pince et le manchon apporte de nombreux avantages:

  • Plus facile à maintenir: pas besoin de tout réimprimer pour faire évoluer les designs
  • Plus évolutif: un seul manchon peut se fixer à de multiples embouts.
  • Plus durable: lorsqu’Emma aura grandi, il suffira d’adapter le manchon, la pince reste fonctionnelle.

La fixation est réalisée par un système de fermeture « quick-lock » :

Côté pince, 

Côté manche,

et le résultat final !

Resultat des essais

Après les premiers essais d’Emma, nous faisons deux constats:

D’abord, Emma est capable de pincer une feuille. C’est une super nouvelle.
En revanche, elle ne trouve pas d’intérêt à utiliser la pince pour boucher ou déboucher un feutre. Emma est tout simplement plus habile avec son coude.

On peut donc valider le concept et imprimer la pince dans la couleur définitive !

Bonus : la pince… à linge !

Si on se concentre uniquement sur la fonction « Pincer une feuille », on peut alors éliminer l’ouverture permettant de coincer le bouchon sur le bout de la pince. Mieux encore, il n’est plus nécessaire de conserver le système de réglage de l’ouverture en vissant/dévissant la molette de serrage.

Un nouveau modèle voit donc le jour, sur le principe de la pince à linge. Mécaniquement plus simple, moins de pièces, plus facile à imprimer, voici le résultat:

Pour conclure

Emma dispose donc de deux pinces, qu’elle peut emboîter dans le même manchon facilement. Elle a donc tout loisir de choisir sa préférée pour s’adonner à ses travaux pratiques !

Timéo Goldfinger

Timéo Goldfinger

Timéo

Il n’est plus nécessaire de présenter Timéo, l’épisode #1 est toujours diffusé ici.

La nouvelle mission allouée à la team Gre-nable par ses parents est de lui permettre d’obtenir son badge FFS 3ème étoile ce qui nécessite l’utilisation de bâtons de ski.

 

Moulage ou scan de la main en position de maintien de bâton ?

Lors d’une séance chez son ergothérapeute, nous avions photographié Timéo tenant un bâton de ski afin de vérifier la position de ses doigts. De façon naturelle, l’effet de pince pour maintenir le bâton était réalisé entre l’index et les trois autres doigts. Cet arrangement serait impossible à réaliser avec une moufle de ski.

Il a été donc décidé de réaliser un moulage de la main avec de l’alginate en prépositionnant les doigts tels qu’ils seraient grâce à l’emboitement sur mesure à concevoir.

Avec l’aide de l’ergothérapeute, les positions des doigts ont été ajustées sur un pseudo-bâton, puis maintenus en position avec une bande adhésive médicale.

Ensuite la réalisation du moulage en alginate resta traditionnelle et le démoulage fut un peu plus délicat afin de laisser le pseudo-bâton et la bande adhésive dans l’alginate.

Protocole toujours bien rôdé par la team, l’étape suivante consiste à obtenir un fichier STL (mesh) à partir du plâtre avec le scanner. Nous gardons une bonne résolution (nombre de triangles) car nous avons abandonné la conversion du STL vers le B-rep qui est une opération trop contraignant.

Chronologie du développement

Phase 1 : Découpe

Le STL est découpé en plans parallèles choisis en fonction des variations importantes de forme de la main.

Sur chaque plan important, un contour est dessiné suivant la périphérie de la section de la main. Le tracé est réalisé à l’aide de courbes de Bezier. Pour ne pas »tromper » l’algorithme interne du logiciel de CAO, le nombre de points d’attache est le même sur tous les tracé.

Etant donné que la main sera dans une moufle, nous jugeons que 5 sections seront suffisantes pour envelopper la main de Timéo.

Phase 2 :  Lofts

Les 5 sections étant dessinées, elles vont être reliées entre elles avec la fonction « Loft » de la CAO.

Avec l’outil Loft, on peut créer des objets complexes en spécifiant des coupes transversales réalisées à partir de faces et de profils d’esquisses fermées, qui guident l’apparence de l’objet objet. Ces sections transversales sont automatiquement connectées. On peut le profil des surfaces créées en ajustant les points de contrôle sur chaque section transversale.
 
Une fois que les sections sont toutes réunies une à une, une surface enveloppante globale est créée. Si l’aspect de la surface est irrégulier, la section en cause de l’irrégularité est retouchée pour améliorer l’aspect global.
 

Phase 3 : Epaississement et isolation

La surface enveloppante est tracée au plus juste à partir des sections du STL. Nous rajoutons un espace de 5mm pour l’épaisseur de la moufle et la capacité à l’insérer avec aisance. Une fonction adaptée de « déplacement de surface » facilite ce décalage de 5mm.

L’opération suivante est la « création de matière » réalisée par l’outil « thicken » (grossissement) qui transforme une surface en volume. C’est l’épaisseur de plastique (PLA) de l’emboitement qui est donc spécifié à cette étape (5mm).

Le logiciel de CAO que nous utilisons est un logiciel de CAO dit « paramétrique » par opposition à la famille des logiciels dits « volumiques ». Cette différence de concept est primordiale dans notre étude, car il sera aisé de revenir à cette étape pour adapter la taille de l’emboitement à la réalité de la main de Timéo et de la moufle.

Et ce fut le cas, car nous avons fait 3 prototypes pour obtenir la taille correcte de l’emboitement permettant à Timéo d’insérer confortablement sa moufle.

Phase 4 : Insertion du pseudo bâton.

En lieu et place du pseudo bâton utilisé pendant le moulage, nous substituons le même volume par un cylindre de même rayon, qui sera enserré par les doigts de la main de Timéo.

L’emboitement adapté à la paume maintient la main, tandis que les quatre doigts enserrant le pseudo bâton complètent le serrage et guident l’appareil lors des mouvements du bâton.

Phase 5 : Ajout du support, mandrin de bâton

Une fois le pseudo bâton positionné, l’excédent de l’emboitement vers l’avant est enlevé pour permettre à la moufle de se refermer sur la poignée.

Le mandrin recevant le bâton de ski est rajouté, avec des longerons de renfort pour supporter les efforts latéraux.

Un œilleton pour la dragonne est rajouté sur la partie arrière de l’emboitement.

Dernière phase

Toutes les arrêtes sont arrondies : les saillantes sont arrondies pour ne pas blesser Timéo, les concaves pour augmenter le nombre de couches en contact lors de la fusion ce qui augmente la solidité des objets imprimés.

 

 

 

Après le glossy bleu/vert du pouce, le glossy gold de Goldfinger !

Le futur champion

Et ça pousse sur les bâtons !!  Mission en partie réussie … le plus dur reste à faire : la 3ème étoile (comme Manon !!)

A suivre

En attente des dernières photos du champion

Bâton de Ski – Nouveau Concept

Bâton de Ski – Nouveau Concept

Manon, espoir JO 2030 ?

La conception précédente de notre bâton de ski pour Pierre-Luc, basée sur le principe de la rotule qui enserrait sa paume, ne nous semble pas nécessaire dans le cas de Manon, car la fonction pince peut être réalisée entre son pouce et son auriculaire. Bien sûr la force de cette pince n’est pas suffisante pour tenir un bâton de ski, donc nous conservons le principe de l’emboitement enserrant sa main.

Nous définissons donc un nouveau cahier des charges pour que la paume de la main gauche ait les mêmes sensations que la main droite.

Scan de la main gauche, équipée d’une moufle

Pour ce nouveau projet, nous essayons de nous passer de l’étape moulage, en réalisant un scan de la main in-situ, en position de maintien du bâton de ski. La main étant équipée d’une moufle qui sera ensuite bien adaptée par la couturière de la famille.

L’opération n’est pas aussi facile que prévue, mais après 3 tentatives, nous obtenons un fichier mesh de bonne qualité.

 

Autre évolution, nous ne transformerons pas le mesh obtenu (au format STL) en fichier B-rep pour l’importation dans le logiciel CAO (Onshape).

Une fois le STL importé dans le ‘part studio’ de Onshape, une surface enveloppante est réalisée autour du mesh, à partir de courbes ‘Spline’ (généralisation des courbes de Bézier) tracées dans des plans de coupes successifs. Ces courbes, représentant une série de sections enveloppant le gant, sont ensuite reliées entre elles par des ‘lofts’. Un loft est une surface obtenue par interpolation entre les différentes courbes, sous la forme d’une surface NURBS (cf wikipedia).

 

Une succession de plans parallèles permettent de découper le poing fermé. Les plans sont référencés sur les points remarquables de la moufle.

Sur chaque plan, une courbe fermée est dessinée pour entourer les limites du STL, créant ainsi une section.  En reliant les sections parallèles successives par des lofts, on obtient l’enveloppe bleue (surface) qui sera ensuite transformée en volume avec la fonction « thicken ».

Après avoir donné de l’épaisseur à la surface développée, coupé l’extrémité pour permettre au pouce de sortir de l’emboitement, tout est prêt pour l’intégration dans le nouveau système.

Description du dispositif incluant un système (simple).

Le nouvel appareil n’est donc plus basé sur le principe de rotule mais sur un système à deux éléments :

  • un élément solidaire du bâton
  • un emboitement enserrant la main de Manon.

La cohésion des deux éléments est réalisée par des aimants néodymes, suffisamment puissants pour que le bâton suive les mouvements de la main, mais permettant de libérer l’emboitement en cas de chute.

Le bâti est solidaire du bâton. Le côté vertical est à l’extérieur pour permettre une éjection de l’emboitement (vers l’intérieur) en cas de chute. Sur la face interne du bâton, on peut voir l’emplacement où sera vissé le petit aimant néodyme circulaire dédié au maintien vertical, et l’aimant rectangulaire, plus puissant, dédié au maintien latéral.

L’emboitement est « collé » sur le bâti grâce aux forces d’attraction des deux aimants.

  1.  Le positionnement correct de l’emboitement est assuré par un dôme centreur, et un emplacement calibré,
  2. Le maintien de l’emboitement sur le bâti est la force d’attraction de l’aimant principal (40x40x4), soit 5 kg,
  3. un deuxième aimant (circulaire) facilite le maintien vertical et le centrage de la main.

Ce premier prototype valide la fonctionnalité de maintien du bâton de ski et son test sur une piste de ski a été concluant pour confirmer nos choix techniques.

Quelques petites améliorations ont été faites pour laisser plus de place au pouce et la version définitive de l’emboitement a été imprimée en matière semi-flexible (BASF indice shore 65D).

Le succès de ce nouveau concept a vite attiré d’autres parents. Nous avons donc revu les scripts de conception, pour que toute nouvelle demande soit rapidement réalisée. Le bâti (HOST sur le plan) est quasi générique, son adaptation à l’emboitement est minime. Par contre un emboitement étant 100% adapté à la taille de la main et au type d’agénésie de l’enfant,  son design est un peu plus complexe.

Ces adaptations de système à la main d’un autre enfant nécessitent de maitriser l’outil de conception CAO, mais n’est pas aussi compliqué qu’il y paraît. Les fichiers STL du système développé pour Manon ne seraient d’aucune utilité pour un autre enfant. Par contre, nos développements sont open-sources et disponibles sur la plate-forme Onshape, et nous sommes toujours prêts à donner un coup de main 🙂 [© E-nable France]

 

 

Fin de saison 2022 – Premiers essais de Manon

Vacances de Février 2023 –

La neige au rendez-vous et Manon obtient sa troisième étoile

La Pince de Timeo

La Pince de Timeo

Timéo

Timéo, jeune garçon de Haute-Savoie, a fait appel à e-Nable France pour améliorer son quotidien et pratiquer ses sports favoris (vélo, ski, foot). L’absence de pouce de sa main bote droite ne lui permet pas de réaliser une pince avec son index.

Après analyse du besoin avec son ergothérapeute du CHU Alpes Grenoble (toujours Véronique !!) et de son ergothérapeute ‘locale’, la team a décidé de développer une attelle qui rajouterait un pouce (imprimé) en position d’opposition par rapport à l’index.

Mais en grand sportif qu’il est, Timéo souhaite pleinement utiliser sa bicyclette tout terrain et gagner ses étoiles FFS lors de la prochaine saison de ski à Flaine.

Donc la team s’est engagée à lui fabriquer également une adaptation pour son vélo et un bâton de ski adapté à son agénésie.

 

Moulage de la main

Timéo habitant un peu loin de Grenoble, nous avons sous-traité à son père la réalisation du moulage de la main. Grâce au tuto trouvé sur Youtube, le papa a réalisé un super moule en alginate, puis a coulé une main en plâtre synthétique pour obtenir un contre-moule de grande qualité.

Protocole bien rôdé par la team, l’étape suivante consiste à obtenir un fichier STL (mesh) à partir du plâtre. Après quelques essais, nous avons opté pour un scan de qualité réduite pour limiter le nombre de triangles du STL.

Ce STL sera la base pour nos 3 projets (pouce, support vélo et bâton de ski). Nous allons donc le transformer au format B-Rep (STEP) pour qu’il soit utilisable directement par Onshape (notre CAO favorite).

 

Description de la solution.

Le système se compose :

  • d’un gantelet placé autour de la main au niveau du poignet ,
  • d’un pouce dessiné sous Blender, à positionner en opposition de l’index,

Quelques points techniques à résoudre :

  • le gantelet doit être adapté à la main de Timéo, facile à chausser, léger et aéré.
    • On applique un design de type Voronoi pour aérer le gantelet tout en assurant une solidité de la structure.
  • le pouce doit avoir la bonne longueur, une courbure permettant de tenir des objets plus ou moins importants et positionné exactement en opposition à l’index dont la mobilité n’est pas complète.

Le gantelet sera conçu à partir du STEP sous Onshape, le pouce sera conçu à partir de l’option modelage de Blender.

Au cours des différentes étapes, nos avons essayé de fusionner avec les deux sous-ensembles en STEP, puis finalement pour la version 3 (version définitive), la fusion a été effectuée avec les modules en STL, après repérage de la position du pouce sur le STEP du gantelet.

 

Prototype #1

Le prototype #1 nous révèle:

  • le gantelet n’a pas assez de jeu avec la main,
  • il faut modifier la fente pour faciliter l’insertion de la main dans le gantelet,
  • le pouce est trop court,
  • la position du doigt n’est pas du tout en face de l’index (il n’avait pas été compris que la flexibilité de l’index était limitée).

Retour à la planche à dessin pour un nouveau pouce et une adaptation du gantelet.

Prototype #2

Le prototype #2 nous révèle:

  • le jeu avec la main doit être augmenté de 1mm,
  • la fente également,
  • le pouce est quasiment à la bonne longueur, quelques mm de plus pour atteindre la perfection,
  • augmenter l’angle de fermeture de la deuxième phalange de 10° (avis de l’ergothérapeute),
  • rentrer le pouce de 10° (avis de l’ergothérapeute).

Retour à la planche à dessin pour un nouveau pouce et une adaptation du gantelet (dernière fois ?)

Prototype #3 (la Der ?)

Intuitant que ce prototype pourrait être le dernier, nous demandons à Timéo de choisir la couleur de son attelle. Elle ne sera jamais invisible donc autant la transformer en élément caractérisant sa personnalité.

Timéo choisit un filament bicolore bleu/vert brillant avec des effets de moiré obtenu aléatoirement lors des couches successives de l’impression.

Cerise sur le gâteau !

Une nouvelle version à base de filament en TPU (Thermoplastic polyurethane) a été imprimée, pour que Timéo puisse porter une attelle pendant ses séances de sport collectif, sans danger pour ses camarades et sans risque de casser son pouce.

Bâton de Ski – Encore un Autre Concept

Bâton de Ski – Encore un Autre Concept

Méli, une coéquipière de Manon pour les JO 2030 ?

Mélissandre, jeune skieuse de Haute-Savoie, a fait appel à e-Nable France pour être équipée d’une paire de bâtons. Son agénésie bilatérale des mains ne lui permet pas de tenir des bâtons du commerce, même si elle peut réaliser une pince entre le pouce et son petit doigt sur un bâton de faible diamètre.

Fort de l’expérience toute récente du bâton conçu pour Manon, la team a rapidement adapté le précédent concept à la morphologie de sa main (droite pour commencer) pour fabriquer un premier prototype. Bien que fonctionnel, ce principe n’a pas été retenu, et nous nous sommes attelés à une nouvelle conception à partir d’une idée du père de Méli.

Et c’est ce nouveau concept que nous présentons ici. Aujourd’hui les bâtons pour les deux mains sont livrés, et nous attendons la saison de ski pour valider le concept. Rendez-vous dès la première neige.

Scan des deux mains

Comme pour Manon, nous nous passons de l’étape moulage, en réalisant un scan des deux mains in-situ, en position de maintien du bâton de ski. Pour cette séance de scan, les mains ne sont pas équipées de gants, afin de bien visualiser la position et la taille des doigts. L’épaisseur des moufles sera simulée lors du design, un paramètre permettant d’ajuster l’épaisseur au fur et à mesure de la réalisation des prototypes.

STL (mesh) de la main gauche de Méli, tenant un bâton pour positionner correctement le bâton dans la paume.

Comme pour Manon, nous ne transformerons pas le mesh obtenu en fichier B-rep pour l’importation dans le logiciel CAO (Onshape).

Une fois le STL importé dans le ‘part studio’ de Onshape, une surface enveloppante est réalisée autour du mesh, à partir de courbes ‘Spline’ (généralisation des courbes de Bézier) tracées dans des plans de coupes successifs. Ces courbes, représentant une série de sections enveloppant le gant, sont ensuite reliées entre elles par des ‘lofts’. Un loft est une surface obtenue par interpolation entre les différentes courbes, sous la forme d’une surface NURBS (cf wikipedia).

 

Description du nouveau concept.

L’agénésie de Méli ne permet pas de tenir un bâton standard, mais la fonction de préhension existant à minima, le concept va donc guider la paume et les doigts en position autour d’un « pseudo bâton » (de section plus petite que le bâton) et enserrer la paume avec deux flasques (supérieur et inférieur) imprimées selon la morphologie des mains scannées.

A tout moment, Méli aura la possibilité d’ouvrir sa main et de lâcher le bâton, donc il n’est plus nécessaire de prévoir un système débrayable de sécurité en cas de chute.

Le système se compose :

  • d’un bâton du commerce (diamètre 18mm),
  • d’un flasque inférieure adaptée à la forme de sa main, avec une vis de blocage de la position verticale du flasque,
  • un pseudo bâton en aluminium de diamètre réduit (12mm) inséré dans le bâton de 18mm,
  • un flasque supérieure également adaptée à la forme de la main, bloquée sur le dessus du pseudo bâton par une vis.

Les tests avec les moufles sont concluants, le poids des dispositifs sont négligeables, attendons la saison de ski.

C’est notre troisième type de bâton de ski. Les agénésies n’étant pas identiques, ces 3 modèles vont continuer à co-exister et à être améliorés,

Ces adaptations de système à la main d’un autre enfant nécessitent de maitriser un outil de conception CAO, mais ce n’est pas aussi compliqué qu’il y paraît. Les fichiers STL du système développé pour Méli ne seraient d’aucune utilité pour un autre enfant. Par contre, nos développements sont open-sources et disponibles sur la plate-forme Onshape, et nous sommes toujours prêts à donner un coup de main 🙂 [© E-nable France]

 

 

Bâton de ski

Bâton de ski

Pierre-Luc, skieur en herbe, futur champion

 

Pierre-Luc est né avec une agénésie de la main gauche et possède depuis plusieurs années un dispositif d’assistance e-nable imprimée en 3D de type « main Phoenix« . Cet appareil qu’il maitrise parfaitement ne lui permet pas d’assister aux cours de ski de fond avec ses camarades de classe.

L’objectif est donc de lui concevoir un dispositif adapté à ce sport qui lui permettra de skier avec le maximum de sécurité.

Nous nous sommes inspirés du dispositif conçu pour le bâton de marche publié dans cet article : dispositif-pour-baton-de-marche.

Comme pour la marche nordique ou bien la randonnée, le risque de chute est un élément important à prendre en considération. La perte de contrôle en ski pouvant entrainer une chute, il était impératif d’imaginer un appareil ayant la capacité de se dissocier rapidement du bâton de ski pour éviter la blessure.

Prise d’empreinte

La première étape de ce projet a consisté à réaliser une prise d’empreinte de la main de Pierre-Luc.

Pour cette opération nous avons utilisé de l’alginate qui est un produit de moulage bien connu à base d’algues marines. La particularité de l’alginate est sa prise rapide et sa souplesse qui facilite le démoulage. Ce procédé de prise d’empreinte a été largement décrit dans nos articles précédents.

 

On coule du plâtre dans le moule en alginate pour obtenir une copie de sa main, que nous numérisons à l’aide d’un scanner 3D pour générer un fichier STL (mesh). Le fichier STL est ensuite transformé en fichier (Brep) à l’aide d’une fonction spécialisée de Fusion360 (Autodesk) pour être utilisable par notre logiciel de CAO favori (Onshape).

Description du dispositif incluant un système (simple).

 

Le dispositif est donc basé sur le même principe de rotule que celui du bâton de marche mais l’ajout d’un système de sécurité est rajouté.

Cette solution permet de désolidariser le système de maintien du bâton de l’emboitement sphérique afin de le libérer. La méthode de blocage par sandow (conservée) a ici deux utilités.

  1. Le blocage du système de maintien de l’emboîtement
  2. Empêcher la perte du système de maintien sur lequel est fixé le bâton de ski en cas de chute.

En quelque sorte, il joue le même rôle qu’une dragonne pour bâton de ski.

Ce premier prototype valide la fonctionnalité de maintien du bâton de ski, mais n’est pas satisfaisant pour la sécurité en cas de chute. La mise en place du verrou (partie supérieure rouge) n’est pas non plus très aisée. Donc deux améliorations sont nécessaires.

Aucun dispositif existant ne pouvant être adapté, Younes va donc créer de toute pièce un dispositif de sécurité innovant.

 

Principe du système de déverrouillage rotatif.

Composition du système:

La complexité du système impose qu’il soit imprimé séparément puis rapporté et maintenu sur la flasque supérieure par une vis. Toutes les pièces du dispositif sont imprimées en PLA. La souplesse des ressorts dépend du nombre de couches d’impression.

La vue de coupe permet de comprendre la cinématique du procédé.

  • Une partie ressort avec un embout sphérique et une partie biseautée Intégrée au corps du dispositif
  • Une languette solidaire du corps du dispositif et qui a pour rôle de conserver en pression le crochet.
  • Le crochet relié à l’emboiture à l’aide d’un cordon.

Le tout est fixé à l’aide d’une vis M4 et d’une gorge sur la coquille.

La vue de la coquille supérieure met en évidence la réserve faite dans la coquille pour insérer le dispositif de sécurité, ainsi que la gorge de maintien du mécanisme.

Coupe complète de l’appareil qui détaille le nombre de sous ensembles qui constituent l’appareil.

L’anneau (couleur rose) à droite a été imprimé en TPU (plastique souple) pour ne pas blesser le poignet de Pierre-Luc. L’avoir dissocié de la rotule en PLA, permet également de rapidement changer sa taille en fonction des gants que le skieur enfilera.

Sur les premiers prototypes, nous avions utilisé un câble sandow pour le maintien et la fermeture de l’emboîtement comme pour le bâton de marche. La tension du sandow rendait difficile le dimensionnement du ressort de l’embout sphérique. Finalement un cordon non flexible s’est avéré plus approprié pour le déclenchement du système de sécurité à crochet.

Ce dispositif de bâton de ski pour un skieur agénésique est présenté au public au forum des sciences à Villeneuve d’Ascq pour l’exposition « Tous sportifs » du 12 septembre 2020 au 29 Août 2021. »

Plus de détails sur leur site forumdepartementaldessciences.fr

Bravo à Younes.